Cinéaste et artiste de renom, figure du cinéma expérimental, le réalisateur allemand Harun Farocki est décédé le 30 juillet 2014 près de Berlin. Il était âgé de 70 ans. Né en 1944, de père indien et de mère allemande, dans une partie de la Tchécoslovaquie alors annexée par l’Allemagne, il a grandi en Indonésie et en Inde avant de revenir étudier en Allemagne.
Élève de la Deutsche Film und Fernsehakademie à Berlin, en même temps que Wolfgang Petersen, Daniel Schmidt ou encore Holger Meins, Harun Farocki fut en outre l’un des animateurs de la revue munichoise Filmkritik, née à la fin des années soixante. Auteur de quelque 90 films, documentaires et courts métrages expérimentaux, le cinéaste essayiste était régulièrement invité dans des manifestations d’art contemporain.
Revenant à l’une des premières photographies, prise le 4 avril 1944 au dessus du camp d’Auschwitz par un avion de reconnaissance américain, dans laquelle les analystes identifièrent le complexe industriel d’IG Farben mais pas le camp de concentration à proximité, Images du monde et inscription de la guerre pose la question de l’interprétation des images et plus spécifiquement de ce que nous ne pouvons ou ne voulons pas voir. Ce n’est donc que dix ans plus tard que la CIA réalisa ce que les Alliés n’avaient pas pu ou refusé de voir : le camp de concentration d’Auschwitz, visible à côté des usines visées.
"Comment faire face à un appareil photo ?" et gérer "la frayeur d’être photographié pour la première fois", se demande en outre Harun Farocki dans ce film qui évoque aussi l’Algérie à travers les portraits de femmes réalisés en 1960 par Marc Garanger. Pour le philosophe et critique François Niney, l’enjeu ici est de "reconnaître le terrain, reconnaître l’ennemi. Faire la lumière, dévoiler"."Aufklärung, note le cinéaste, un terme de l’histoire des idées et un terme militaire. Aufklärung, un terme de police : le renseignement. La police veut à présent travailler sur des images".
A sa façon, Harun Farocki témoigne d’un incessant questionnement sur les progrès et les usages dans la production et l’utilisation de l’image et sur les liens de l’art et du politique. "Il faut être aussi méfiant envers les images qu’envers les mots, prévient le cinéaste. Images et mots sont tissés dans des discours, des réseaux de significations. Ma voie, c’est d’aller à la recherche d’un sens enseveli, de déblayer les décombres qui obstruent les images."
Pour Christa Blümlinger, "les films de Farocki explorent pour une part les convergences entre la guerre, l’économie et la politique à l’intérieur de l’espace social. Ils esquissent une histoire audiovisuelle de la civilisation (post-)industrielle et de ses techniques, dans laquelle les évolutions déviantes sont particulièrement mises en lumière".
Dans le DVD publié par Survivance, Images du monde et inscription de la guerre est couplé avec En sursis (2007), qui restitue les rushs tournés en 1944 par un prisonnier juif, Rudolf Breslauer, dans le camp de Westerbork aux Pays-Bas.
– 28 octobre 2017 - 18 mars 2018, Harun Farocki : "Du travail – Empathie", Marseille / Friche de la Belle de mai
– 23 novembre - 14 janvier 2018, Harun Farocki : "Images contre elles-mêmes", Rétrospective, Paris / Centre Pompidou
– September 14, 2017 – January 28, 2018, Harun Farocki Retrospective, Berlin / Neuer Berliner Kunstverein (n.b.k.)
– 29 January – 5 June 2016, Harun Farocki : Parallel I-IV (2012-14), London / Whitechapel Gallery – 30 January 2015, Harun Farocki : Images of the World and the Inscription of War, London / Tate Modern – September 9, 2014 - October 4, 2014, Harun Farocki : ‘Parallel’, New York / Greene Naftali Gallery – 6. Februar - 13. Juli 2014, Harun Farocki. "Serious Games", Berlin / Hamburger Bahnhof - Museum für Gegenwart – 15 janvier – 15 février 2014, Harun Farocki : "Parallèles", Paris / Galerie Thaddaeus Ropac – 2 February - 31 March 2013, Harun Farocki
Installations. Films, Buenos Aires / Fundación Proa – October 21, 2012, Screening of Harun Farocki’s Images of the World and the Inscription of War, Brooklyn [NY, USA] / The Law Office of Sergio Muñoz Sarmiento – 22 mai 2012, Pratiques et politiques mémorielles : "Le destin de la monstruosité : Harun Farocki et Günther Anders, une question de visibilité", Intervenant : Ian Simms | Répondant : Catherine Perret, Paris / EHESS, 105, bd Raspail, Salle 6
– 11 - 20 May 2012, "Harun Farocki for the First Time in Warsaw", Planete+ Doc Film Festival, Warsaw / Centre for Contemporary Art / Ujazdowski Castle
– 7 October - 5 November 2011, "Harun Farocki and Vernon Ah Kee : War at a Distance and Tall Man", Melbourne Festival / Gertrude Contemporary Art Spaces – June 29, 2011 - January 2, 2012, "Harun Farocki : Images of War (at a Distance)", New York / The Museum of Modern Art (MoMA)
– 9 - 11 mai 2011, "Trois jours avec Harun Farocki" par Le Bal, Paris / La Fémis - Ensad - Sciences Po
– 10 Fevruary - 15 April 2011, "Harun Farocki : Image Works" | Paola Yacoub : "Drawing with the Things Themselves", Beirut Art Center – 27 November 2009, Harun Farocki. 22 Films 1968-2009 : Programme Seven, London / Tate Modern – 9 avril - 7 juin 2009, "Harun Farocki : rétrospective et carte blanche", Paris / Musée du Jeu de Paume – 9 mars 2007, Festival Cinéma du réel > Rétrospective Histoire(s) allemande(s)
– 4 de noviembre 2004, "Pensar en imatges", Museu d’art contemporàni de Barcelona – 25 octobre 2001, Cycle "Images de la pensée", projection en présence du cinéaste, Paris / Auditorium du Louvre – 19 - 25 août 2001, 13e États généraux du documentaire de Lussas
Images du monde et inscription de la guerre (Bilder der Welt und Inschrift des Krieges/Images of the World and the Inscription of War/Imágenes del mundo y epitafios de guerra) et En sursis (Aufschub/Respite)
de Harun Farocki
(Doc., 75 et 40 min., All, 1988 et 2007 // 4:3 et 16:9)
Aucune
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