Le narrateur est un jeune villageois du désert irakien dont le séjour d’étudiant à Bagdad a été interrompu par l’intervention américaine de 2003. Deux épisodes particulièrement violents vont achever de faire de ce jeune bédouin sans histoire un prétendant au sacrifice kamikaze. Le second a lieu lors de l’irruption de soldats américains au milieu de la nuit dans la maison familiale. Là, il assiste au spectacle humiliant de ses sœurs blafardes, à moitié dévêtues avec leur marmaille en pleurs, de sa mère éperdue et de son père au regard sinistré, à moitié nu, au slip avachi. Et puis le coup de crosse d’un GI, suivi de la chute du père et de l’irrémédiable. Car alors songe le narrateur, "voir le sexe de mon géniteur, c’était ramener mon existence entière, mes valeurs et mes scrupules, ma fierté et ma singularité, à une grossière fulgurance pornographique". A cet instant, il sait que plus rien ne sera comme avant et qu’il se trouve "condamné à laver l’affront dans le sang".
Dans ce roman qui clôt la trilogie entamée par Les Hirondelles de Kaboul et poursuivie avec L’Attentat, Yasmina Khadra dit être allé chercher "au commencement du malentendu, au plus proche de cet homme qui, un jour, décide de se faire sauter au milieu d’innocents", aux fins de sensibiliser le lecteur et lui prouver "que ce monde-là ne traverse pas une crise idéologique mais politique". "Certains croient que le terrorisme est une seconde nature chez les Arabes et les musulmans, ajoute Yasmina Khadra, "or, ce sont précisément ces derniers qui en souffrent le plus et qu’on essaye d’isoler ainsi dans leur tragédie". (Le Monde des Livres, 28 septembre 2006)
Porté par trois voix (Rachid Benbouchta, Farid Bentoumi et Catherine Le Hénan), Les Sirènes de Bagdad a été créé au théâtre dans une adaptation et une mise en scène signées René Chéneaux. Évoquant la force du texte de Yasmina Khadra, le metteur en scène estime qu’"il expose un théâtre d’idée plus qu’une matière offerte au voyeurisme. Il cherche la ligne de crête, à la manière d’Eschyle ou Camus, entre l’acte dément et l’acte juste, entre le terrorisme et la révolte".
– 12 avril 2010, Trappes / La Merise
– 14 novembre 2009, Théâtre de Vanves
– 9 octobre 2009, Paris / Centre Culturel Algérien
– 3 - 4 octobre 2009, Vitry sur Seine / Théâtre Jean Vilar
– 13 - 19 juillet 2009, Association Repères, 10, rue Rateau, 84000 Avignon
– 10 - 15 juillet 2009, Avignon / La Manufacture
– 16 - 22 juillet 2008, "Trois voix pour les Sirènes de Bagdad" : atelier de création ouvert au public, Avignon / Association Repères, 10, rue Rateau, 84000 Avignon
Les Sirènes de Baghdad de Yasmina Khadra
Adaptation et mise en scène René Chéneaux
Par la compagnie Kick Théâtre
Avec Rachid Benbouchta, Farid Bentoumi, Catherine Le Hénan
Scénographie : Chantal Hocdé
Lumières : Charly Thicot
Les Sirènes de Bagdad
de Yasmina Khadra
(Paris, Julliard, 2006)