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  Rue Darwin

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Petit éloge de la mémoire

Boualem Sansal en a décidément gros sur le cœur. Dans Rue Darwin, un roman dont tous les personnages sont réels, l’écrivain égrène cinquante ans de l’histoire tourmentée de l’Algérie, du mitan du siècle dernier à nos jours, en retournant sur les pas de son histoire personnelle. La voix posée et le réquisitoire implacable sur le sort fait au pays "qui ne laisse de répit ni à la vie ni à la mort", Yazid, le narrateur, s’est attelé à remuer les cendres du souvenir et à ressusciter les miettes de sa mémoire familiale.

A la mort de sa mère, en réponse à une injonction intérieure et aussi pour solder les comptes d’une vie entière passée à "mentir, travestir, arranger", Yazid retourne rue Darwin, dans le quartier de Belcourt à Alger, sur les reliefs d’une partie de son enfance. "Il n’y a pas d’oubli sans une vraie mémoire des choses", note le narrateur qui va s’employer à capter et consigner par écrit "des bouts de souvenirs accrochés à rien, des murs délabrés, des visages incertains, et, précise-t-il, mon seul pauvre témoignage pour assurer mes dires".

Estimant que le temps est venu "de déterrer les morts et de les regarder en face", le voilà rue Darwin, dans la venelle de ses huit ans au moment de la bataille d’Alger, qui retisse les fils d’une histoire plus ancienne encore, qui nous emmène dans le monde villageois où il a fait ses tout premiers pas sous l’œil d’une toute-puissante grand-mère dont la fortune immense s’est bâtie sur un florissant bordel jouxtant la maison familiale.

Patiemment, tout en retrouvant une fratrie dispersée aux quatre coins du monde, réunie autour de la dépouille de la mère, puis en enchaînant les découvertes sur l’identité réelle de ses parents et sur l’existence d’un frère inconnu, en se retournant sur les affres d’une guerre ignoble, les désillusions des années post-indépendance, l’immobilisme, les conservatismes, les archaïsmes et la montée de l’intolérance religieuse, Yazid détricote un imaginaire familial et national fait d’oublis, d’omissions, d’occultations et de mensonges et qui, invariablement, "efface les mauvaises questions et fait apparaître de jolis contes".

Au crépuscule d’une existence passée en petits arrangements avec les vivants et les morts, tout l’enjeu de cette ultime immersion dans les paysages du passé algérien et du sien propre est de naître enfin à lui-même. "Vivre serait donc cela, dit encore le narrateur, retrouver le sens premier dans l’errance et la quête... et l’espoir qu’au bout est le fameux paradis perdu, la paix simplement."


Audio > Rue Darwin de Boualem Sansal > France-Culture - Emission "Les Bonnes feuilles" par Isabelle Yhuel (19/08/11, 14’)


 13 - 14 September 2013, Oslo Book Festival
 8 - 22 March 2013, Beijing / The Bookworm International Literary Festival
 20 - 24 mars 2013, Bruxelles / Festival Passa Porta
> 20 mars : lecture d’ouverture du Festival par l’écrivain algérien Boualem Sansal
 24 janvier 2013, Boualem Sansal : "Un cœur pour la paix", Débat animé par Géraldine Kamps, Saint-Gilles [Bruxelles] / Centre Communautaire Laïc Juif
 13 - 18 May 2012, International Writers Festival / Jérusalem / Mishkenot Sha’ananim
> Programme de Boualem Sansal
 12 - 16 October 2011, Frankfurter Buchmesse | Frankfurt Book Fair


 Rue Darwin de Boualem Sansal
(Paris, Gallimard, 2011)

 


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